JEAN-BAPTISTE
RICHARD dit DE RADONVILLIERS
1788-1850
Au chapitre des personnages injustement oubliés, il est
certain que Jean-Baptiste Richard, né à Dienville, tient une place de choix.
Né en 1788, il est proprement un enfant de la Révolution laquelle,
outre des événements historique que l’on connaît est aussi porteuse d’une
tournure d’esprit. Nous voici face à un lexicographe en avance sur son temps,
mais reconnu par les dictionnaires de langue actuels ; et à un agitateur
d’idées nouvelles. Ces deux domaines se rejoignent parfois. Un personnage à
découvrir.
Le dictionnaire «
Petit Robert » 1970, le cite parmi les auteurs d’« ouvrages importants pour l’histoire de la
langue » avec le « Dictionnaire des mots nouveaux de R. de Radonvilliers » en
1845.
Puis, le «
Dictionnaire historique de la langue française » publié sous la
direction d’Alain Rey en1992, le liste parmi les principaux textes de référence
pour les datations dans l’annexe « Correspondances chronologiques » page 2358 :
« 1842 Enrichissement de la langue française. Dictionnaire de mots nouveaux
(Jean Baptiste) Richard de Radonvilliers ».
La famille Richard est
originaire de Dienville, où Jean-Baptiste est né en 1788, fils d’un
huissier, notaire, marchand de bois,
futur administrateur du département de l’Aube en 1790.
La famille Bechuat, Jean-Baptiste a épousé en 1811 une fille
de l’avocat Louis-Théodore Bechuat, administrateur du département de l’Aube en
1790, maire de Radonvilliers.
L’importance de la production du bois, dans les forêts de
l’Aube et de son flottage assuré à partir du port et par des mariniers de
Brienne-la-Vieille, se retrouve dans les activités de ces familles, chargées
d’organiser l’expédition du produit des forêts voisines, pièces de marines et
de charpentes, vers Paris.
Un
auteur de dictionnaires
Jean-Baptiste Richard publie deux dictionnaires de mots nouveaux, en 1842 puis
en 1845.
Le journal « Le Courrier français » salue le 7 avril 1842 la
publication du premier ouvrage.
Ce dictionnaire est remarqué dans la presse nationale,
notamment par « Le Siècle » le 11
juillet 1843 et encore le 4 avril 1844.
« Le Siècle »
commente le second dictionnaire le 19 décembre 1845.
« Ce dictionnaire recense les plus effrayants barbarismes
que la langue française puisse créer. Par exemple, les mots : abymiser, pour
ouvrir des abîmes ; anglaiser, pour imiter la forme anglaise ; dédeuiller, pour
sortir de deuil ; délicier, pour rendre délicieuse ; … vigiliser, pour devenir
vigilant, éveillent la susceptibilité
des oreilles les moins délicates. Si
nous les entendions prononcer, nous nous croirions pour le moins en
Belgique, où la langue française se permet de singulières excentricités…
On peut apprécier de nos jours ses tentatives de
féminisation du lexique.
Quelques exemples de mots et notions :
Amatrice : nf d’amateur ; celle qui a un goût particulier pour une chose. L’usage
n’a pas jusqu’alors admis ce féminin, ni celui d’autrice. Cette inadmission
vient plutôt d’une vieille habitude que jusqu’alors on n’a pas osé combattre,
quoique paralysant le principe de la raison ; car, on dit bien actrice, et
assurément aujourd’hui on ne dirait pas une femme acteur.
Sororialement, adv d’une manière soriale ; agir
sororialement
Sororiser : v.act : lier, se lier ; unir comme deux sœurs,
par une affection, un attachement de sœur ; former, établir un lien, une
intimité de sororité…
Et quelques curiosités comme : Franc-maçonner, v. neut ;
faire de la franc-maçonnerie, se livrer à la franc-maçonnerie : vous
franc-maçonnez !
Et puis, des formes d’anticipations, même si le sens n’est
pas le nôtre, comme :
Numériser, v. act ; rendre numérique, plus nombreux…
Nutricité, s. f. état, qualité de ce qui est nutritif
Un
lexicologue commenté, contesté puis reconnu
Francis Wey, diplômé de l’Ecole des Chartes, en 1846,
critique violemment le second dictionnaire, dans le journal « La Presse » du 26
octobre.
« Alors survient un
recueil de 50 à 60 000 mots fabriqués par le dit sieur Richard de
Radonvilliers, et qu’il engage le public à apprendre par cœur. Qu’ils ont bon
air ! Supériorable, superfluisme, sucrable, vinaigrement, virginaliser,
abalourdissable, atrabilariation, astronomiser, paradisme (système de
paradisation)… zérotisation, zizagable, ostrogother, oseiller, paratonnerrable,etc…
Tout le livre va de même : il ne contient pas un mot de
français. C’est là que devait conduire cet abus de la liberté lexicologique, au
ridicule et à la démence… »
Arsène Darmesteter (1846-1888) propose en 1887 une analyse
plus nuancée du travail de Richard de Radonvilliers dans sa thèse de doctorat:
« De la création actuelle de mots nouveaux dans la langue française et des lois
qui les régissent ».
« Dans les vingt mille mots que M. Richard, de
Radonvilliers, présente au lecteur, et avec lesquels il l’engage à se
familiariser, en dépit de l’inhabitude, près de deux mille cinq cents sont des
privatifs nouveaux composés avec dé ;
avec re … La méthode est d’une simplicité parfaite, comme toutes les méthodes
vraiment fécondes. Quelques-unes de ces créations sont d’une élégante
originalité : « la guerre fléause les
peuples » ; héréditariation, s’amourdiser, mauvaisujettiser, immalpropreté, mot
indiquant la qualité de ce qui n’est pas malpropre, de ce qui est propre « car deux négations se détruisent et valent
une affirmation ; maingratisable, c’est-à-dire ce qui est susceptible de
prendre le penchant, le caractère de l’abbé Maingrat, de se livrer comme lui,
au viol, à l’assassinat de ses pénitentes ! »
La démarche de J-B Richard s’inscrivait dans celle tendant à
faire du dictionnaire un instrument d’éducation populaire à partir de la fin du
XVIIIe siècle, comme celle de Louis-Sébastien Mercier dans sa « Néologie ou
vocabulaire de mots nouveaux » en 1801 (An IX - Paris).
Plus récemment, de nombreux auteurs ont utilisé les
dictionnaires de Richard pour dater l’introduction de nouveaux mots
(capitalisme, internationalisme, thermalisme, décoloniser…) dans des champs
divers.
Gilles-Antoine Langlois dans sa thèse de doctorat (septembre
1999 à l’Institut d’Urbanisme de Paris), « Des villes pour la Louisiane
française » évoque l’apport de J-B Richard.
« Le vocable « urbanisme » proposé par Richard (dit « de Radonvilliers ») dès
1842, venant englober dans son acception actuelle l’ensemble des disciplines
nécessaires à la saisie du fait urbain. Dans la seconde édition de son
Enrichissement de la Langue française en 1845, qui n’est pas un dictionnaire
des usages reconnus, mais un ensemble de propositions pour un nouveau lexique,
Richard précise son projet, qui consiste bien à compléter la langue par des
expressions nouvelles prises à partir des mots existants. Ainsi donne-,t-il les
définitions suivantes :
« Urbaniser : donner, prendre de l’urbanité, l’élégance de
la ville, de la politesses, un bel usage du monde. S’attacher à la ville. … il urbanise ses manières, cette personne
s’urbanise »
« Urbanisme : grande, supérieure, urbanité qui se montre
continuellement et en tout (système d’urbanité ; ce qui est, ce qui montre une
continuelle urbanité : c’est de l’urbanisme) »
Auteur
de brochures de réflexion et propositions politiques 1844-1848
« Du véritable
gouvernement constitutionnel et du droit des peuples », Paris, 1844
Le journal « Le Siècle » commente ainsi cette brochure le 4
avril
« Ce petit ouvrage est un résumé habilement fait des
principes de tout gouvernement représentatif et des droits qui appartiennent à
chaque corps et à chaque classe de l’état. L’auteur y démontre tous les dangers
de l’influence politique du clergé et les inconvénients de sa trop grande
prépondérance. Ces divers points de vue ne peuvent manquer de populariser le
travail consciencieux de M. Richard. »
« Lettre aux contribuables non électeurs », Paris, 1846
Le journal « La
Quotidienne » la commente le 27 juin
« Notons d’abord que M. Richard est dynastique. Il pense que
le dynastique est une condition d’ordre dans la révolution. C’est précisément
par-là qu’il donne de puissantes armes
contre la politique dynastique ; nous allons citer quelques-unes de ses
paroles.
« Les élections doivent
renouveler la chambre des députés, ne décideront-elles pas pour la France : à l’extérieur une halte
dans l’humiliation et la honte, à
l’intérieur une halte dans l’intrigue, le gaspillage et la corruption ?... La
France va reprendre son rang en Europe, une grande vie nationale par nos votes
; ou par eux elle va continuer à rester à la merci anglaise, à ramper sous le
mensonge, l’astuce, la fourberie et achever de perdre sa place dans la balance
européenne. »
« Nous voulons tous de la dynastie actuelle, du
mode de gouvernement existant : car, en fait d’organisation et de constitution
de corps social, il faut un point principal et fixe auquel on se rattache : et
changer ou varier ce point c’est prendre le risque de ne savoir à quoi se
rattacher. »
qui bornent la réforme au renversement de M. Guizot, et la
révolution même à l’avènement de M. Thiers ».
« Les causes d’une
révolution. Le gouvernement représentatif et mode électoral » Paris 1848
Publiée quelques semaines avant la révolution de février
1848, la brochure reprend les pensées philosophiques, morales et politiques
disséminées au sein des articles de son premier dictionnaire. L’ambition de
Richard était de participer aux débats de philosophie politique pendant la
Restauration et la Monarchie de Juillet. Il réaffirme son admiration des
principes premiers de la révolution de 1789 qui ont été dévoyés par les
gouvernements successifs. Acteur de la Révolution de 1830, révolution faite par
le peuple et pour lui, il déplore les gouvernements successifs qui ont renié
son origine et faussé son principe constitutif. Ces gouvernements ont rompu les
accords avec la société et rendu nécessaire une révolution pour améliorer les
institutions sociales et politiques. Ces gouvernements ont transformé la
révolution du peuple en une révolution de parti. En ne prenant pas en
considération les commencements d’irritation nationale comme des
avertissements, ils n’ont pas compris ou méprisés le peuple. Ils deviennent dès
lors incapables de gouverner.
Il critique la proposition de réforme électorale de M.
Duvergier de Hauranne, député du Cher, d’un abaissement du cens à cent francs
avec adjonction de capacités prises dans un ordre élevé, qui ne remédie en rien
aux vices de la loi électorale en vigueur. Il propose le suffrage universel
sans condition (pour les hommes) à deux niveaux, les électeurs désignant les
grands électeurs qui éliront les députés…
JB
Richard, acteur politique dans l’Aube 1830-1840
Les deux principaux journaux départementaux au début des
années 1830 sont Le Journal de l’Aube et Le Progressif de l’Aube.
Leurs orientations politiques apparaissent dans la relation
qu’ils font de la visite à Troyes de Louis-Philippe, roi des Français, en juillet 1831.
Rapport du Préfet de l’Aube sur la presse régionale
Le 13 juillet 1833, le préfet s’adresse au Ministre de
l’intérieur et des cultes pour décrire le positionnement politique de la presse
dans l’Aube et l’entourage du journal d’opposition « Le Progressif » dont J-B
Richard est l’un des actionnaires.
Deux journaux politiques seulement sont publiés dans le
département de l’Aube, tous deux à Troyes.
Le premier et le plus répandu est le Journal de l’Aube qui
compte 14 ans d’existence ; les rédacteurs sont M. Jules Béliard pour la partie
politique et Jules Jaillant pour la partie littéraire, ils n’ont d’autre but
que leur intérêt particulier… Depuis le mois d’avril les abonnés de cette
feuille ont diminué, elle avait alors 577, aujourd’hui elle en a 490. Il parait
qu’il en est ainsi chaque année et que les abonnements se renouvellent à
l’automne.
Le Progressif de l’Aube, journal qui date de 1830, est la
seconde feuille politique du département, il est tiré à 200 exemplaires mais il
n’a que 170 abonnés dont 100 habitent à Troyes, il faut ajouter le nombre de 80
abonnements pris par la Société parisienne pour la liberté de la presse. Malgré
ce secours, ce journal ne peut couvrir ses frais et est soutenu par douze
personnes qui ont récemment fait un sacrifice de 500 Fr chacun à cet effet.
M. Apollin Michaux est totalement déplacé au milieu de ces
prétendus républicains, il est loin de partager leurs opinions et leurs
conduites ; il se borne à être le caissier du journal dont il est créancier
pour de fortes sommes.
MM. Fontaine, Thiérion fils, Richard et Baudin-Anheim cherchent à éliminer leurs
collègues, ils voudraient s’attirer à eux seuls, la propriété du journal ; ils
trouvent que sa couleur n’est pas assez tranchée, tandis que les autres
auraient désiré faire une opposition sage et honorable.
J’espère que la scission sera complète et que les absurdités
débitées effrontément par MM. Fontaine et Cie feront rentrer dans la véritable
ligne leurs anciens alliés honteux d’avoir été si longtemps abusés.
Quoiqu’il en soit lors même qu’ils se tiendraient tous en
phalange serrée, ils crieraient dans le désert comme ils l’ont fait jusqu’à ce
jour et ne trouveront aucune sympathies dans les masses laborieuses de la
population de ce département.
Leur influence est nulle, leur moralité mauvaise, au moins
incertaine, et de tels hommes ne peuvent que nuire à la cause qu’ils
soutiennent. Les gens instruits haussent les épaules et le peuple ne les
comprend pas.
Déclaration de principes du journal « Le Progressif de l’Aube »
Acte passé devant Me Bernot à Troyes 16 avril 1832 pour la modification de la société
Saint-Amant et compagnie publiant le journal « Le Progressif de l’Aube ».
Les membres sont :
Jean Soleil Amant, dit Saint-Amant, homme de lettres, gérant
Associés en commandite : Frédéric Olivier, professeur de
mathématiques ; Melchior Grosdemange, pharmacien ; Admé Rémy fils, négociant ;
Julien Delière-Guy, négociant ; Achille Guy, négociant ;… Apollin Michaux,
banquier, M. Richard, propriétaire à Radonvilliers ; Philippe Guillaumot,
propriétaire à Piney ; Jacques Charles Piolley, huissier à Troyes .
L’esprit du journal ne devra jamais s’écarter des principes
suivants et de leurs conséquences dont il est destiné à réclamer l’application
immédiate et sans réserve :
La souveraineté populaire, l’égalité des citoyens devant la
loi ;
La liberté individuelle, celle de la presse et des cultesLa
liberté d’enseignement, ou au moins la modification la plus libérale du système
de l’instruction publique ;
La responsabilité réelle et entière des ministres et de tous
autres agents du pouvoir et membres des autorités administratives et
judiciaires ;
Le droit d’élection directe, exclusivement en faveur de tous
les citoyens et sans exception
L’application du jury à la mise en accusation en matière
criminelle, et à tous les délits qui sont actuellement du ressort des tribunaux
correctionnels ;
L’abolition des titres, privilèges, cumuls et sinécures ;
L’abolition du cens d’éligibilité pour la formation de la
représentation nationale
L’incompatibilité de toutes fonctions et de tous emplois
publics avec la qualité de député ou de représentant de la nation.
Quelques actions politiques de
Jean-Baptiste Richard dans l’Aube
Il prend la succession de son beau-père Louis-Théodore
Bechuat, à la tête de la municipalité de Radonvilliers en 1814 et il prête
serment, avec l’ensemble des conseillers, de fidélité et loyauté à Louis XVIII.
Les lettres adressées par les dirigeants de l’association «
Aide-toi le ciel t’aidera » en mars et juin 1832, à leurs correspondants de l’Aube, notamment Chambette, Millard et
Perrot-Prailly, conservées dans le fonds
Millard à la médiathèque de Troyes éclairent le positionnement de Jean-Baptiste
Richard.
« Ainsi l’association
propose de recenser les patriotes les plus influents, ceux qui ont obtenu les
suffrages de leurs concitoyens, qui occupent un grade élevé dans la Garde
nationale et dont le patriotisme et le dévouement à la cause de la liberté ne
peuvent être mis en doute. Ils suggèrent de publier des brochures utiles au
pays pour éclairer l’opinion publique sur ses véritables intérêts, et
travailler à la propagation de nos principes et au développement de la liberté.
»
La presse nationale relate quelques faits concernant JB
Richard
« Le Courrier »
publie le 1er novembre 1832 :
« M. Richard, chef de bataillon des gardes nationales du
canton de Radonvilliers, vient d’être suspendu pour deux mois par une décision
du conseil de préfecture de l’Aube du 24 courant. Voici dit le Progressif de
l’Aube, les motifs qui ont donné lieu à cette condamnation :
M. Richard avait reçu l’ordre de s’arranger de manière à ce
que, si le conseil de discipline se réunissait le dimanche, les séances fussent
terminées pour le moment de l’office, ou ne commençassent qu’immédiatement
après. Il a refusé d’exécuter cet ordre, pensant qu’il rappelait trop les
habitudes de la Restauration, et le juste-milieu, qui nous ramène à grand pas
vers cette époque, s’en est vengé en le faisant suspendre. »
Le 19 novembre 1832 :
« Le 15, les souscripteurs de l’Association pour la liberté
de la presse dans l’Aube, se sont réunis au bureau du Progressif de l’Aube, à
l’effet de constituer un comité pour la direction des opérations relatives à
l’association.
Ont été élus, à une grande majorité : M. Argence, capitaine
en retraite, chevalier de la Légion d’Honneur ; secrétaire : M. Cénégal, avocat
; membres consultants : MM. Thiérion fils,
notaire ; Chambette , propriétaire ; M. Fontaine , avoué Delière,
négociant ; A Girault , homme de lettres , à Troyes ; Jeanson , notaire à
Villenauxe ; Maucourant , négociant à Arcis ; Maillard , notaire à Aix-en-Othe
; Richard , propriétaire à Radonvilliers . Le comité va se mettre immédiatement
en rapport avec les citoyens qui désireront souscrire : les souscriptions
seront reçues chez chacun des membres du comité et au bureau du Progressif de
l’Aube»
Le Progressif de
l’Aube, le samedi 3 août 1833
Discours prononcé par M. Richard, de Radonvilliers, à un
banquet patriotique, le 28 juillet
.
« Messieurs,
Envahis par les nations étrangères qui, confiantes dans les
promesses de leurs souverains, crurent en s’amoncelant contre nous combattre
pour leur liberté, tandis qu’elles rivaient plus étroitement leurs fers. Sous
le joug d’une restauration qui ne devait que mettre à exécution les décrets des
hauts potentats de l’Europe ligués contre les peuples, nous cessions d’être des
citoyens, nous devenions la propriété des rois, en un mot nous étions
patrimonisés, humiliés, tyrannisés, nous souffrions les coups d’une fatalité
préparée par la trahison, débordée par les plus honteux excès de la conquête,
et, comme tourmentés de nostalgie nous cherchions la patrie dans la patrie ;
mais nous ne trouvions que l’arbitraire et le despotisme…
…
En 1843, JB Richard
réside avec sa femme à Paris, 12, rue de la Croix-des-Petits-Champs et signe
une procuration permettant à celle-ci de vendre plusieurs terres dont elle
vient d’hériter avec sa sœur après le décès de leur mère.
Jean-Baptiste Richard disparait ensuite de la scène auboise
ainsi que son épouse.
Il est cité dans l’état-civil de la commune de
Radonvilliers, le 22 décembre 1860 pour le décès de sa femme, Adélaïde Bechuat,
âgée de 69 ans, résidant rue principale, veuve de son mari décédé à Paris sans
précision de date.
L’état-civil parisien reconstitué, après sa destruction par
incendie sous la Commune, ne comporte qu’un seul Jean-Baptiste Richard décédé
le 20 juillet 1850 Paris
Pour
conclure :
Si le nom de Jean-Baptiste Richard de Radonvilliers a été
oublié pour son rôle politique sous Louis-Philippe et pour ses propositions de
modifications électorales, son apport de néologue, philologue est désormais
reconnu.
Le nom de Jean-Baptiste Richard sera évoqué en quelques
lignes, en 1881 par Arsène Thévenot, dans ses « Statistiques du département de
l’Aube » dans le chapitre consacré aux « savants dont l’Aube peut légitimement
se sentir honorée ».
Jean-Baptiste Richard aurait pu reprendre, la confidence
faite par Théophile Gauthier à son gendre Emile Bergerat :
« Je ne sais pas, me dit un jour le maître, ce que la
postérité pensera de moi, mais il me semble que j’aurai été au moins utile à la
langue de mon pays. Il y aurait ingratitude à me refuser après ma mort, ce
modeste mérite de philologue » (dans «
Théophile Gautier », page 115).
La version intégrale de ce texte est publiée dans l'édition 2020 des
Mémoires de la Société Académique de l'Aube, tome CXLIV en vente dans
les bonnes librairies de l'Aube et accessibls prochainement dans
plusieurs médiathèques.